Un milliard de plus pour la recherche publique civile en 2005

Résumé des propositions du CIP

 

Le CIP expose dans le texte qui suit pourquoi il est vital pour notre pays de faire dès 2005, un effort majeur d'investissement dans la recherche. Toutes les grandes nations ont en effet analysé l’importance stratégique du système de formation supérieure et de recherche qui, au-delà de son importance culturelle, conditionne chaque jour davantage l’innovation, clé du succès de leur économie. Il est donc urgent de combler le retard important accumulé dans notre pays en ce domaine. Les propositions de réforme qui sont faites  constituent les grandes lignes permettant de comprendre les propositions pour le budget 2005. Leur détail sera précisé à l'issue des Etats Généraux qui remettront leurs conclusions fin octobre 2004. 

 

1. La crise de la recherche en 2004 a été provoquée par un étranglement progressif de l'appareil de recherche, touchant les moyens des laboratoires comme les personnels. Il n'y aura pas de réforme possible du système de recherche sans qu'y soient affectés les moyens promis de longue date. Quelles que soient des difficultés budgétaires indubitables que connaît actuellement notre pays, le milliard d'euros supplémentaires pour la recherche, en 2005, est un investissement absolument crucial pour la recherche et, demain, pour l'économie du pays.

 

2. La répartition de ces moyens, au service d'une politique de recherche ambitieuse, pourrait nécessiter le réaménagement d'instances de gouvernement (Grand Ministère de la Recherche, de l’Enseignement Supérieur et de l’Innovation, Instance d'orientation stratégique).

 

3. Dans la progression des budgets 2005 et 2006, il conviendrait d’envisager un ratio de l’ordre de 60/40 entre moyens et emplois, afin de donner une priorité au rétablissement de la compétitivité des laboratoires et des équipements nécessaires à la recherche, qui ont été très malmenés ces dernières années. Il faut donc prévoir des moyens très significatifs pour que les établissements de recherche puissent prendre les mesures indispensables permettant de remettre l'appareil de recherche en état de marche.

 

4. Des mesures incitatives précises doivent compléter le soutien de base affecté aux laboratoires. Elles viseront d'une part à favoriser l'émergence de projets sur thèmes libres, à l'initiative des chercheurs, et d'autre part permettront la mise en œuvre de thèmes considérés comme prioritaires. Il faudra concevoir une structure mieux adaptée que le FNS pour l'attribution des moyens incitatifs.

 

5. Evaluation : soutien de base comme mesures incitatives seront répartis sur une base sélective à des équipes et laboratoires évalués rigoureusement. Des propositions en vue d'améliorer l'organisation de l'évaluation seront formulées à l’issue des Etats Généraux de la Recherche.

 

6. L'attractivité des métiers de la recherche, et donc son avenir, exigent un ensemble de mesures visant notamment à améliorer la situation des jeunes chercheurs et enseignants-chercheurs (doctorants, post-doctorants, ATER). Les recrutements de chercheurs et d'enseignants-chercheurs seront efficaces s'ils sont systématiquement accompagnés de recrutements d'ITA et de IATOS, et de moyens permettant l'installation et le lancement de nouveaux projets.

 

7. L'activité de recherche des enseignants-chercheurs doit être encouragée, ce qui implique un allègement notable de leur charge d'enseignement, après évaluation. Ces mesures ne peuvent être mises en œuvre que par des recrutements universitaires complémentaires spécifiquement fondés sur des critères de recherche au-delà des normes d'encadrement des étudiants. Elles seront complétées par des recrutements sur des emplois temporaires (ATER) et par des possibilités de détachement dans des organismes de recherche.

 

 

 

 

 

Un milliard de plus pour la recherche publique civile en 2005

 

 

Constat et attendus

 

            La réunion de Lisbonne en 2000 a été l’occasion pour les chefs d’État et de Gouvernement des Quinze d’affirmer leur volonté de faire de l’Europe à l’horizon 2010 la première économie mondiale basée sur le savoir. A cet effet le Président de la République et le Gouvernement se sont fermement prononcés, à plusieurs reprises depuis 2002, en faveur de la directive européenne recommandant de porter à 3 % du PIB l'effort de recherche en 2010. Cela représente pour la France une augmentation de 40% de la dépense intérieure de recherche et développement (DIRD). Si cet effort était supporté par les seules entreprises privées, cela conduirait à un quasi-doublement de l’effort de recherche privé ; or, même si le secteur industriel se doit d’assumer ses responsabilités, les entreprises ont clairement exprimé l’impossibilité d’atteindre un tel résultat. L’objectif des 3% n’a donc de sens que dans le cadre d’un volume significativement accru de la dépense publique de recherche.

 

Les comparaisons internationales font de l’effort de recherche publique français l’un de ceux qui sont parmi les plus importants, après l’Allemagne, au sein de l’Europe. Mais la caractéristique de notre effort de recherche est de mener simultanément de front plusieurs grands secteurs, tels la recherche militaire, le soutien aux industries nucléaires, spatiales, aéronautiques. Ce qui reste pour la recherche de base des universités et des organismes correspond à environ 0.6% du PIB, ce qui nous situe nettement en-dessous de nos concurrents, et la crise présente est due en partie à ce relatif abandon.

 

Si l’on imagine, pour fixer les idées, que l’objectif d’augmentation de 40% de la DIRD se partage également entre le public et le privé, cela se traduirait par une augmentation d’environ 8% par an du BCRD, c’est-à-dire près de 4,5 Milliards € en trois ans. On voit donc que l’objectif annoncé par le Gouvernement de 3Milliards € en trois ans reste encore en deçà des ambitions affichées. Ce n’est que par des mesures nouvelles que pourront voir le jour de nouveaux pôles où formation de haut niveau, recherche de base et technologie interagissent. [A titre de comparaison mentionnons la décision du Canada qui a créé en 2004 un fonds de $13 Milliards pour la recherche universitaire, avec 2 000 chaires de recherche nationale, en supplément du financement habituel de la R&D].

 

En réponse au mouvement des chercheurs du secteur public le Premier Ministre a promis pour 2005 un milliard de plus pour la recherche, sans préciser pour quel secteur. Des mesures pour le soutien de la recherche privée sont certes nécessaires. Il faudra trouver un ensemble de mesures réellement incitatives et ciblées sur des secteurs prioritaires, ce qui n'est pas le cas du crédit impôt-recherche actuel, bien trop indiscriminé, dont la facture devrait augmenter de 500 millions € en 2005. Mais pour la seule recherche publique, à laquelle la recherche privée doit s'adosser et sans laquelle elle est vouée à sombrer, il faudrait investir pour au moins un milliard de mesures nouvelles dès 2005.

 

Avant de parler de mesures nouvelles, il faudra affecter des moyens au rattrapage d'un retard accumulé très important, comme le souligne le CSRT ( Conseil Supérieur de la Recherche et de la Technologique) dans son dernier avis (27 mai 2004) voté à l’unanimité: "Pour les principaux EPST, la baisse très importante des CP dans le budget 2003 et leur  maintien strict au niveau 2003 dans le budget 2004 conduisent aujourd'hui à d'importants  manques de CP pour assurer le financement des actions engagées. Si des mesures ne sont pas  prises dans le budget 2005, la mise en œuvre de la LOLF se traduira par une baisse notable  des moyens et entraînera soit des annulations d'AP antérieures soit des prélèvements sur les CP 2006 pour pallier le défaut de couverture par des CP antérieurs, situations préjudiciables au moment où commencera à s'appliquer la nouvelle loi d'orientation et de programmation de  la recherche qui devrait être votée à la fin de l'année 2004. Le CSRT demande au gouvernement de prendre, dès le budget 2005, les mesures nécessaires afin que les EPST ne soient pas pénalisés par la mise en œuvre de la LOLF en 2006,  notamment au niveau des laboratoires, et qu'ils puissent donc honorer leurs engagements, au niveau national comme international et particulièrement européen."

 

En plus de la remise à niveau des budgets des établissements de recherche et d’enseignement supérieur,  il faut donc envisager,  un milliard dévolu à des mesures nouvelles.

 

Remarque : La France consacre peu de moyens par étudiant à son enseignement supérieur : cela se constate à tous les niveaux lorsque l’on compare nos établissements d’enseignement supérieur à ceux de nos voisins. Seuls l'activité de recherche des universitaires et les moyens des universités pour la recherche sont directement pris en compte ici. Mais il faut prendre garde aux besoins directs liés à l'enseignement, dans le contexte de la mise en place de la réforme LMD, sans oublier l’entretien du patrimoine.

 

 

Propositions de relance de la recherche publique

 

Les propositions qui suivent, élaborées à la suite de longues discussions rassemblant de nombreux acteurs de la recherche, sont inspirées par une vision ambitieuse de la place de notre recherche et par un souci d'efficacité et de réalisme. Nous nous sommes efforcés de nous garder à la fois du conservatisme et du danger qu’il y a à proposer des options plus spectaculaires qu’efficaces. Au cours des dernières années, on a vu se succéder une série de nouveaux programmes, mis en place de façon dénuée de toute transparence, vite remplacés par d'autres, sans évaluation de l'efficacité du programme précédent. Les nouvelles fondations qui viennent d'être mises en place peuvent en constituer un nouvel avatar. Ce sont certes des mesures nouvelles, mais qui ne présentent  pas  a priori les caractéristiques requises pour pouvoir être efficaces.

 

Les propositions que nous faisons ici, , ne sont pas faites pour être spectaculaires mais pour être efficaces. D'autres mesures de réorganisation du système de recherche seront présentées en octobre, lors du Colloque qui clôturera les Etats Généraux. Elles seront bien entendu beaucoup plus complètes que celles que nous sommes en mesure d'exposer aujourd'hui. Les propositions de réforme qui sont faites ici ne constituent donc nécessairement que les grandes lignes permettant de comprendre les propositions financières pour 2005.

 

 

1-     Etablissement d’un grand Ministère ainsi que d'une instance d'orientation stratégique

 

            Le développement indispensable des relations entre le monde de la recherche avec celui de l’enseignement supérieur et avec le monde économique, nécessitent l’établissement d’un ministère de plein exercice  de la Recherche, de l’Enseignement Supérieur et de l’Innovation.

Par ailleurs, une Instance d'orientation stratégique, placée auprès du Premier Ministre, devrait être appelée à jouer un rôle important dans la définition de la politique de recherche, (programmes prioritaires, équilibres disciplinaires, grands instruments, etc.). Son rôle devrait être déterminant pour accompagner les réformes à mettre en place, et s’assurer que les principes qui les guident sont bien respectés.

 

2- Principes de répartition des moyens nouveaux

 

Il est proposé de donner la priorité au rétablissement de la compétitivité des laboratoires et des équipements nécessaires à la recherche. En effet les quinze dernières années ont été marquées par une forte dégradation des moyens de recherche  disponibles par chercheur. C’est pourquoi il faudrait que  dans la progression des budgets 2005 et 2006, l’effort porte davantage sur les moyens : il conviendrait donc d’envisager un ratio de l’ordre de 60/40 entre moyens et emplois.

 

En ce qui concerne les moyens affectés aux laboratoires, une idée force est qu'il faut des mesures incitatives précises. Mais si ces dernières sont plaquées sur un système au bord de la faillite, du fait de l'étranglement budgétaire des dernières années, elles n'auront pas de fonction incitative mais seront détournées pour simplement garder le système à flot. Il serait donc irréaliste et démagogique de ne prévoir de moyens nouveaux que pour des projets nouveaux. Il faut prévoir une part très significative pour rétablir les finances des établissements de recherche afin que des mesures indispensables permettent de remettre l'appareil de recherche en état de marche acceptable.

En ce qui concerne l'emploi, on mettra l'accent sur deux points : (1) L'emploi des jeunes. (2) L’importance accrue accordée à la recherche des enseignants-chercheurs dans les créations d’emplois

 

3. Moyens de fonctionnement et d'équipement affectés à la recherche publique

 

Une fois effectué le rattrapage qui amènera le budget des établissements de recherche au niveau de 2002 et non pas de 2004, les moyens seront répartis entre soutien de base et mesures incitatives. Le soutien de base ne signifie pas un saupoudrage indifférencié, dès lors qu'il est accordé aux seules équipes et laboratoires contractualisés, sur la base de leur programme de recherche, au terme d'une évaluation rigoureuse, dont les modalités pour le futur seront revues pour plus d'exigence et d'efficacité.

 

Soutien de base comme mesures incitatives seront répartis sur une base sélective et structurante pour aider à la mise en œuvre des mesures préconisées à l’issue des Etats Généraux de la Recherche.

 

Dans cette répartition, il faudra tenir compte

-   de choix disciplinaires, pour commencer à rattraper le retard d'investissement particulièrement marqué dans certains domaines comme les sciences de la vie.

- d'équipements lourds et mi-lourds collectifs (plates-formes, notamment pour les Instituts Fédératifs de Recherche), Maisons des Sciences de l'Homme, etc…

-    de la nécessité d'encourager les coopérations public-privé, notamment avec les PME innovantes, par exemple via le FRT

-   de programmes innovants inter-organismes

-   de l'aide à la mise en place de pôles de compétence (politique de sites expérimentaux)

-   du financement des équipes nouvelles (ATIPE, Avenir, certaines ACI)

 

Ces différents moyens devront permettre de donner des inflexions significatives, de manière souple et expérimentale, à des disciplines ou à des thématiques qui doivent trouver rapidement une place plus conforme à leur importance. Leur répartition sera faite en s'appuyant sur une évaluation dont les modalités seront revues pour plus de transparence et d'efficacité, qui fera une large place au contrôle a posteriori.

 

La mise en œuvre de ces financements devra se garder de deux écueils. Il faudra éviter :

 

-          de stériliser la recherche fondamentale par une définition trop étroite de thèmes prioritaires. Il faudra garder impérativement un espace significatif pour des appels à projets « blancs » innovants.

-          de dépouiller les organismes de recherche et les universités des possibilités de mettre en œuvre une vraie politique de recherche (en particulier les financements sur projets doivent s'ajouter aux dotations de base, et non se substituer à celles-ci).

 

La plus grande partie du financement du Fonds National de la Science (FNS) devrait être transférée vers ces nouvelles actions incitatives (les missions du FNS étant désormais limitées à des actions telles que le déploiement de plates-formes technologiques). Des propositions d’organisation de ce mode de financement seront précisées dans le rapport final du CIP, mais quelques principes devront être pris en compte : il faudra une structure légère (c’est-à-dire se gardant d’instituer une administration nouvelle), bien ancrée sur les organismes et les universités, destinée à une programmation ouverte à l’ensemble des organismes et universités. Ceci est particulièrement nécessaire dans des domaines comme les sciences de la vie.

 

A titre peut-être transitoire, pour l’année 2005, avant que les décisions d’organisation ne soient prises et actées, il semble nécessaire d’utiliser les organismes nationaux de recherche, en association avec les établissements d'enseignement supérieur, pour mettre en place ces appels à projets. Les décisions devront suivre un cahier des charges; plusieurs conditions doivent être obligatoirement remplies :

• les crédits dévolus à ce mode de financement seront délégués aux organismes de façon spécifique

• les appels à projets seront ouverts à toute la communauté nationale, en veillant bien à toucher l’ensemble des organismes et des établissements d’enseignement supérieur

• le choix des experts français et étrangers chargés d’évaluer les projets, la sélection des projets retenus, et le suivi de leur réalisation, seront confiés à un comité associant les différents établissements qui sont acteurs du domaine concerné.

  

 

4- Emploi

 

a. Mesures spécifiques pour les jeunes.

 

       Il est clair que nos inquiétudes pour l’avenir tiennent beaucoup au déficit d’attractivité des carrières offertes dans notre pays pour les chercheurs et universitaires. Nous devons affronter la double concurrence (1) des autres branches d’activité du monde socio-économique qui ont pour effet de détourner, avant même de s’engager dans une thèse, beaucoup de jeunes doués et attirés par la science, (2) et des systèmes académiques étrangers, en Europe comme aux Etats-Unis, en termes de rémunération et d’accompagnement à la recherche. Au plan qualitatif les départs de chercheurs encore jeunes, mais qui ont déjà fait preuve de leur inventivité, est catastrophique pour notre pays.

 

Il est donc urgent de se donner les moyens de sortir de cette spirale négative, dont les effets se font sentir depuis une dizaine d’années. Il faut donc prévoir une combinaison de mesures :

 

-            une amélioration nette de la situation financière des doctorants, et de la couverture sociale (y compris cotisation retraite) des titulaires de "bourses" doctorales ainsi que des post-docs,

 

-            une revalorisation des carrières, notamment en leurs débuts, suivant des modalités à préciser : suppression ou raccourcissement du temps de passage des premiers échelons, meilleure validation des services antérieurs, modification de la grille indiciaire, etc.

      

Améliorer l'attractivité de la recherche implique aussi une série de mesures qui devront être proportionnées aux perspectives d'emplois stables:

-          des postes d’ATER (en donnant à ceux-ci un demi-service d'enseignement pour un salaire plein), et de jeunes chercheurs contractuels (entre thèse et thèse +2), supplémentaires ,

-          favoriser le retour des "expatriés", pour lesquels les aides au retour devraient être renforcées.

-          faire un effort considérable pour attirer les élèves et étudiants les plus brillants vers les carrières de recherche et d'enseignement supérieur.

-           

 

b. Priorité, dans les créations d’emplois, aux mesures favorisant l'exercice de l'activité de recherche par les enseignants-chercheurs

 

Amélioration de la place de la recherche dans les Universités

 

Une partie importante de l'enveloppe affectée à des mesures nouvelles pour l'emploi sera consacrée à un ensemble de dispositions permettant aux enseignants-chercheurs de faire de la recherche dans de meilleures conditions.

 

Les tâches des enseignants chercheurs se consacrant à la recherche sont réellement bien trop lourdes. En particulier les jeunes universitaires nouvellement nommés sont surchargés d’heures de cours, nouveaux par définition, au moment où ils doivent souvent mettre en place une activité de recherche intensive après leur recrutement. Il est donc nécessaire que leurs premières années de carrière soient accompagnées de décharges de service importantes afin de leur permettre d’exercer pleinement leur mission de recherche.

Il faut également que les horaires d’enseignement de tous ceux qui se consacrent à une recherche significative soient réduits, que les enseignants-chercheurs aient la possibilité d’avoir des périodes de détachement à temps plein, ou à mi-temps, dans un organisme de recherche, et disposent au cours de leur carrière d’années sabbatiques. La création, dans les EPST, d'un nombre important de postes d'accueil pour les enseignants-chercheurs (avec remplacement automatique de ces derniers) constituera un levier efficace pour permettre aux enseignants chercheurs d'exercer réellement leur double métier.

 

Cette ambition n’a de sens que dans le cadre d’une véritable évaluation des enseignants-chercheurs dans la pluralité de leurs tâches. Cette politique, indispensable et reconnue dans tous les pays où la qualité de la recherche universitaire est fortement encouragée, n’est possible qu’à deux conditions :

- des créations de postes plus nombreuses sur des critères de recherche. Cela implique que l’évaluation de la recherche soit explicitement prise en compte dans le nombre et la définition des postes d’enseignants-chercheurs ouverts aux concours. Les normes fondées exclusivement sur le nombre d'étudiants (San-Remo) ignorent la mission de recherche des universités.

-  la mise en place de carrières diversifiées au sein des universités, (qui se traduiraient aussi par une compensation par d’autres activités des services des universitaires qui ne se consacrent ni à la recherche, ni aux tâches administratives communes).

 

 

Enseignement supérieur et organismes

 

Le volume total des emplois dans l’enseignement supérieur et les organismes doit donc augmenter pour tenir compte de ces objectifs de recherche. Ceci néanmoins doit se faire de manière diversifiée entre organismes et universités. Dans un premier temps, pour 2005, nous souhaitons que le nombre de chercheurs statutaires des organismes soit maintenu constant. En dehors des personnels de soutien (discutés plus loin), toutes les créations de postes se feront pour des MC dans les universités, et pour des postes dans les EPST réservés à des périodes de détachement total ou partiel d’universitaires, après évaluation rigoureuse des dossiers. L'équilibre souhaitable, dans les EPST, entre le nombre de postes de chercheurs statutaires et celui de postes d'accueil pour universitaires sera ajusté progressivement, dans les années suivantes. Ce sera une des responsabilités de l'instance d'orientation stratégique évoquée plus haut, de faire évoluer ce point d'équilibre, qui pourrait être différent suivant les disciplines.

 

On s’engagerait ainsi dans une politique, dans laquelle sans diminuer, voire en augmentant le nombre d’emplois statutaires de chercheurs, on diminuerait progressivement la proportion de chercheurs à temps plein à vie. Les départs à la retraite au sein des EPST permettent d’envisager cela de manière souple au cours des dix prochaines années. Il importera que les Etats Généraux fassent des recommandations précises à ce sujet.

 

La mise en place d’une politique de recherche demande, chaque fois que l’on engage un nouvel enseignant-chercheur , que l’on crée autour de lui un véritable environnement de recherche, en accompagnant ce poste nouveau des ITA et/ou IATOS de recherche indispensables , de postes d’ ATER, d'emplois post-doctoraux, d’allocations pour doctorants, afin d’accompagner ce nouvel emploi et lui donner toutes ses chances de succès.

 

Il y a globalement dans les établissements de recherche et les universités françaises trop peu soutien par enseignant-chercheur : au lieu de pouvoir se consacrer à leur recherche, les enseignants-chercheurs passent une partie déraisonnable de leur temps à des tâches qui devraient être effectuées par un personnel spécialisé. Il faut créer un équilibre des fonctions dans les équipes en apportant le soutien nécessaire aux chercheurs et enseignants-chercheurs.

 

Le développement de notre recherche, ici visé, ne serait pas compatible avec une diminution du volume total de l’emploi scientifique public (établissements d’enseignement supérieur plus organismes). Les mesures visant à redonner du temps de recherche aux enseignants-chercheurs les plus actifs dans ce domaine, et tout particulièrement les jeunes universitaires, devraient être accompagnées des créations d’emploi corrélatives.  Dans une période de forts départs à la retraite, la situation ainsi créée pour les jeunes devrait devenir nettement plus favorable que celle qu’ont connue les générations antérieures. De surcroît l’indispensable mise à niveau des carrières, depuis les doctorants jusqu’aux grades élevés, la nécessité d’accroître le personnel technique (ingénieurs et techniciens), devront être budgétisées . L'ensemble de ces mesures qualitatives et quantitatives concernant l'emploi nécessiteraient de l’ordre de 400 millions d’€.

 

Document adopté par le CIP le 24 juin 2004